10 mai, Fontenay-sous-Bois

Commémoration des abolitions des traites et des esclavages dans le domaine colonial français.


lundi 20 février 2012

Esclaves = énergie = robot = facteur de production

L'Homme © 1983 EHESS
(c/o Jstor)
On connaissait l'ouvrage "Esclave = facteur de production. L'économie politique de l'esclavage." rédigé sous la direction de Sidney W. Mintz et dont la traduction en français par Jacqueline Rouah est parue en 1981 aux éditions L'Œil économique. Dans son compte-rendu de lecture, Laënnec Hurbon (1983), publié après la chronique bibliographique de Christian Deverre (1982)  nous disait : "Au départ, je me demandais ce qu'un ouvrage réunissant des articles parus ici et là, certains il y a dix ans, pouvait bien apporter de vraiment neuf sur l'esclavage. A la vérité, cette anthologie, conçue et préparée pour un public francophone, se révèle, à la lecture, d'une très grande actualité et fait ressortir par contraste l'indigence et le retard des recherches en langue française sur l'histoire de l'esclavage".

Nous savions que l'esclavage n'a pas disparu de la face du monde, qu'il s'est seulement métamorphosé comme décrit dans l'article d'Hervé Théry, Neli Aparecida de Mello Théry, Eduardo Girardi et Julio Hato, « Géographies du travail esclave au Brésil », Cybergeo : European Journal of Geography, Espace, Société, Territoire, article 541, mis en ligne le 23 juin 2011, consulté le 20 février 2012

Trajectoires d'esclaves
Brésil, 1995-2006.
La persistance de cas d’esclavage au Brésil, en plein XXIe siècle, met en lumière la contradiction profonde entre la maîtrise des technologies modernes acquise par ce pays et l’exploitation dont sont victimes des milliers de travailleurs brésiliens. Dans cette étude1, nous examinons les formes contemporaines de l’esclavage qui existent encore dans certaines régions rurales du Brésil, où les travailleurs exécutent des tâches pénibles dans des conditions inhumaines, sans recevoir un paiement approprié pour leur travail et surtout sans pouvoir le quitter librement. (Lire la suite)


Et voici que je découvre l'ouvrage de Jean-François Mouhot  "Des esclaves énergétiques : réflexions sur le changement climatique", préfacé par Jean-Marc Jancovici.

Jean-François Mouhot est docteur en histoire de l'Institut Universitaire Européen. Il est chargé de recherches à l'Université de Georgetown (Washington) et à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales à Paris. Son premier livre, Les Réfugiés Acadiens en France (1758-1785) (Septentrion, 2009) a obtenu le prix Pierre Savard 2010. Il connaît donc, en principe, l'esclavage du 18ème siècle auquel nous nous référons en général.

Jean-Marc Jancovici connaît, lui, la question énergétique : voir sa conférence "L'ingénieur face à la contrainte carbone - Quels défis pour le 21e siècle ?".

L'article de Fabien Locher, "L'Histoire face à la crise climatique", La vie des idées, revue en ligne, nous donne quelques clés de lecture de l'essai de Jean-François Mouhot. L'article nous conduit également à la critique.

Dans le premier, l’auteur discute des liens possibles entre l’utilisation d’esclaves en Amérique du Nord et dans les colonies des Caraïbes, et l’usage des combustibles fossiles coextensif à la « révolution industrielle » initiée en Angleterre à la fin du XVIIIe siècle. Bien qu’il note que ce concept de « révolution industrielle » est aujourd’hui contesté – comme l’est, ajoutera-t-on, l’idée d’une origine purement anglaise du processus d’industrialisation, il justifie son emploi par la « nette rupture historique » que constitue le recours massif aux énergies fossiles expérimenté en l’Angleterre (p 28). Puis il aborde deux questions : le lien entre l’esclavage et ce qu’il appelle le « décollage industriel » anglais ; l’influence que l’essor de l’usage industriel des énergies fossiles a pu avoir sur la montée des revendications abolitionnistes et l’interdiction du travail servile. Le propos est très généralisant et s’appuie presque exclusivement sur des sources secondaires.

Ils n'ont pas été les premiers à rapprocher énergie et esclavage. Nous avons déjà présenté "Les servitudes de la puissance. Une histoire de l'énergie" par Jean-Claude Debeir, Jean-Paul Deléage, & Daniel Hémery, 1986.

Mais, nous ne connaissions pas jusqu'à ce jour l'esclave énergétique qui serait une unité de mesure de l'énergie, comparant une consommation d'énergie avec un équivalent de production mécanique qu'un adulte en bonne santé pourrait produire en un an. Le concept est utilisé dès 1944 par Richard Buckminster Fuller (1895-1983), architecte et philosophe.

1944- 2012... 68 de retard... Est-ce important ?

Pour ne pas aggraver le handicap, lisons de suite cet article "Guerre et commerce : indissociable" où nous rencontrons l'EROEI : pour faire simple, si vous prenez un humain de base et si vous parvenez à le faire travailler autant tout en lui donnant 2X moins fois de nourriture ou de confort (maison / terrain / liberté), vous augmentez son EROEI de 2 … en fait, vous venez tout juste d’inventer l’esclavage 

(et probablement que d’autres vont inventer la révolte aussi). Bien fait !

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